Que représente cinq années d'une vie quand nous en avons vécu quatre-vingt-seize? Peu de chose et pourtant, la période de la seconde guerre mondiale marqua à tout jamais Roger PRIOL. Ces dernières années, il avait su partager en détails son parcours. Comme il nous faudrait la journée pour le retracer, je n'ai conservé ici que quelques passages, les voici :
En 1940, la débâcle pousse la famille Priol à quitter Paris. Après l'armistice, ils s'installent définitivement dans leur très modeste maison de vacances à Plougonvelin. Roger y retrouve ses amis et notamment Simone. C'est grâce à elle qu'il entre dans la résistance avec pour mission de diffuser des tracts sur le secteur de Plougonvelin. Tâche qu'il effectuera sans encombre jusqu'à ce qu'il soit coupé de son groupe implanté à Brest. Le groupe sera arrêtée plus tard et ils connurent une triste fin.
Pour Roger, le danger est également présent comme en février 1942; lors d'une opération de renseignement, il est arrêté par les allemands. Après interogatoire à Brest, il est finalement relâché. L'officier allemand qui parle très bien le français lui déclare je sais que vous n'êtes pas un espion. Fin limier n'est-ce pas ?
Bouillonnant, notre résistant tente de quitter la France devenue prison sans barreau, pour rallier l'angleterre et la France Libre. D'abord avec Claude Le Mao qui possède un bateau mais celui-ci sera brisé sur les roches par des Allemands l'ayant emprunté. Plusieurs autres échecs le forcent à renoncer, c'est le début d'une longue période d'attente. Cette période lui pèse et détériore son moral.
L'espoir revient en mai 1943 par son ami Jo Quéré. Ce dernier lui présente un résistant de Brest, un certain Grand-Turc. L'homme ne joue clairement pas dans la même cour, il a tout d'un grand et impose des consignes drastiques pour la sécurité ; cloisonnement, noms de code et surtout il ne faut parler à personne. Les missions continuent jusqu'au débarquement en Normandie.
Dès le lendemain, ordre est donné par Grand-Turc de recruter des combattants. Roger s'affère et contacte ses connaissances ayant une expérience militaire. Pas un seul des contactés, ne refuse, tous sont volontaires même les pères de famille. Cette agitation vaut à Roger d'être dénoncé aux allemands. Son réseau le met au vert dans une ferme à Plouzané. Une fois l'orage passé il reprend du service et participe au parachutage de Kervezeon. Hélas l'avion ne largue pas les armes et il faut prendre le maquis du côté de Tréouergat.
C'est de là-bas que partira la reconquête du territoire. Roger participe à la libération de la poche du Conquet avec les soldats américains du 2nd Rangers Bataillon. Des combats, il ne donnait jamais trop de détails et préférait nous faire rire en mimant son ami Michel Quéré touché par un éclat... de betteraves. Les allemands chassés, Roger est affecté au Bataillon de Sécurité et avec d'autres F.F.I il participe au réapprovisionnement de Plougonvelin, cela faisait quatre mois qu'il n'y avait plus de pains dans la commune et il y a beaucoup de bâtiments et d'habitations à réparer.
Après la libération il reprend sa vie normale sans même prendre le temps de remplir les papiers militaires. Il ne souhaitait pas de distinction, il avait fait ce qu'il devait faire et s'estimait heureux d'avoir survécu à tout cela.
Une fois en retraite, Roger s'occupera de la mémoire de ceux n'ayant pas eu cette chance et ces dernières années il œuvrait beaucoup à la transmission vers les jeunes générations. Avec sa disparition, une page d'histoire se tourne à Plougonvelin. Souvenez-vous de lui et de ses copains, c'est tout ce qu'il souhaitait.
Vive la France, vive la Résistance
Roger Priol vient de décéder à l’âge de 96 ans. | DR